[font=Trebuchet MS][size=13]Voici le sujet sur lequel je posterais de vieux et récents textes sur mes personnages ou sur les pensées philosophiques de l'astronaute claustrophobe atteint de sinusite aiguë. Peut-être qu'il vous laissera un petit message d'amitié un de ces jours. Les commentaires sont bien évidemment les bienvenus, les remarques aussi, mais ce serait gentil de pas être trop cinglant(e)s.
Voilà, sur ce j'espère ne pas vous atrophier les yeux avec des fautes oubliées ou des trucs trop peu travaillés. Bisousbgj"l kneorbigeo^swj,nvpkf.
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Dernière édition par Midlecter le Ven 10 Avr - 17:17, édité 1 fois
Midlecter
Messages : 20 Date d'inscription : 07/04/2013 Age : 26 Localisation : HERE'S JOHNNY!
Sujet: Re: Clafoutis maison Mer 24 Juil - 21:39
"Dis, tu veux venir en vacances avec moi?"
À ces mots, un léger sourire malicieux apparait sur tes lèvres. Ce rictus, je le connais si bien. Toujours à jouer avec mes nerfs pas vrai? Bien sur que je veux venir avec toi, tu sais que la distance entre nous me rend fou. En moins de dix minutes, je fais mon sac. Rajoutes-en trente pour qu'on arrive jusqu'à la gare, 4 heures de route et nous voilà arrivés en Normandie. Tout est si simple avec toi pas vrai? Et pourquoi cet endroit? Il y a la mer, certes, mais on s'les pèle putain, t'aurais pas pu choisir une destination pouvant nous réchauffer un peu plus les miches? Et pourtant, tu t'balades en short et en tunique tout en longeant les murs des grandes baraques s'étendant près de la mer, comme s'il faisait beau et chaud. Toujours à jouer les je-m'en-foutiste, avec ton regard impénétrable. J'ai du plonger un milliers de fois mes yeux dans les tiens. Ils sont beaux, en amande et d'un gris/vert très clair. Tu n'trouves pas le besoin de te maquiller. En général tu le fais seulement lorsque tu veux me rendre jaloux à en crever, à aller draguer des types semblant avoir plus à t'offrir que moi. Moi, qui ne suis que trop pauvre pour être considéré comme riche. Trop petit pour avoir l'air grand, trop bête pour être intelligent. Oui, j'ai hérité des yeux de mon père, ils sont bleus foncés et avec mes cheveux rouge cuivré, je peux arriver à plaire aux filles. Mais qui aurait cru que je te plairais à toi? T'es si parfaite, si fourbe, si comblée, si destructrice. On arrive à l'hôtel avec le peu de bagages qu'on a. Lorsque je te demande combien de temps tu comptes rester, tu te contentes de fermer les yeux et de continuer de marcher, toujours devant moi. Ça t'éclate de m'faire passer pour une sous-merde pas vrai? En entrant dans la chambre, je remarque notre super vue sur une plage de galets. On ira se bousiller la plante des pieds plus tard, car tu retires déjà tes fringues, comme si c'était prévu dès le départ qu'on coucherait en arrivant. Une fois de plus, je réfléchis pas, je sais que ça sert plus à rien avec toi de toute façon. Je t'embrasse, doucement au début et un peu plus fort ensuite, par peur que tu te fasses chier. J'me désape, tu m'entraînes contre le matelas un peu trop rude à mon goût et on passe à l'acte. Une fois que c'est fini, on se rhabille sans rien dire, on s'parle pratiquement pas de toute façon. Tu rattaches tes cheveux dont la couleur se situe à mi-chemin entre le bleu et le violet. Quelques boucles restent dans ta nuque, mais ça t'importe peu. Tu prends ton paquet de clopes et ma main, avant de m'entraîner à l'extérieur. J'aurais du me couvrir un peu plus, j'ai l'impression qu'il fait encore plus froid que tout à l'heure, j'en ai la chair de poule. Tu le remarques et évidement, ça te fait sourire. C'est ça, fous-toi de ma gueule, tu sais que je dirai jamais rien de toute façon. On marche jusqu'à la plage, et tu laisses tes chaussures sur les innombrables pierres recouvrant une partie de la côte. Je t'imite et grimace en rencontrant une désagréable sensation lorsque je sens les cailloux usés sous mes pieds. Tu te mets à courir au bord de l'eau, éclaboussant ainsi mon visages et mes fringues. Tu commences à saigner des talons à force de te planter des bouts de coquillage dedans. L'eau salée vient se frotter contre ta blessure et te voilà de nouveau en train de sourire face à cette délectable douleur. Tu as ensuite l'idée farfelue de grimper tout en haut des plus hauts rochers de la grève. Sans attendre ma réponse, tu commences à escalader dangereusement ces derniers, t'écorchant ainsi les genoux et les coudes. Quelques griffures d'un rouge vif apparaissent, quelques filets de sang coulent doucement les long de tes membres. Une fois arrivés en haut, on contemple la vue qu'on a d'ici. La mer est dégueulasse, toute pleine d'algues, avec cette eau turquoise aux reflets verts. Le ciel est sacrément couvert, quelques gouttes commencent à s'abattre sur le peu de végétation aux alentours. Tu étais en train d'essayer de t'allumer une cigarette et maintenant tu abandonnes, jetant dans l'eau et sans le moindre remord ton paquet ainsi que le briquet à essence que je t'ai offert pour tes dix-sept ans. Tu te tournes ensuite vers moi, juste pour voir ma réaction. Je suis trempé, j'ai les sourcils froncés et les joues rouges de rage. Te revoilà en train de rire. Tes lèvres ne se sont pas fendues en un rictus quelconque, mais tes yeux dévoilent cette drôle d'animosité, la même que lorsque je t'ai poussée de justesse contre un mur alors que tu étais sur le point de te faire écraser, il y a trois mois. Qu'est ce que tu prépares encore? Tu détaches tes longs cheveux qui descendent en cascade dans ton dos et prends mon visage entre tes mains, posant ton front contre le mien. Je sens ta respiration apaisante, ton odeur très douce mais enivrante. J'ai les yeux fermés, mais je te vois si bien. J'arrive à percevoir tes lèvres pâles sur lesquelles glissent quelques gouttes. Tes cheveux sont eux aussi imbibés d'eau et se collent contre tes joues, ton cou, tes épaules et ta poitrine. Une légère pression vient s'exercer contre mes lèvres et dès que j'ouvre de nouveau les mirettes, tu n'es déjà plus contre moi. Je te rejoins au bord des rocs impétueux. Tu plonges un pied dans le vide et en moins de temps qu'il ne m'en faut pour réagir, tu te retrouves déjà happée par les vagues ardentes. Depuis le début tu me mènes en bateau. Tu es trop consciente de ce que tu provoques, trop brillante pour te dire que tout ce qui t'entoure est une bénédiction, trop adroite pour rater ton coup. Et trop espiègle pour ne pas savoir que je te suivrai dans ta chute. Je serai donc à jamais éperdu de toi, espèce de salope.
Midlecter
Messages : 20 Date d'inscription : 07/04/2013 Age : 26 Localisation : HERE'S JOHNNY!
Sujet: Re: Clafoutis maison Jeu 25 Juil - 1:57
Marion
La Narcisse de l'impatience
Depuis toute petite, je rêve d'être quelqu'un d'important. Influencer la vie des gens, être entourée de personnes qui m'admirent et qui mourraient pour une minute d'attention... C'est mon but ultime, mon apogée orgasmique, le zénith de ma vie. À l'âge de 7 ans, je prenais mes premiers cours de chant et de théâtre. Je faisais en sorte de bien travailler, de finir tous les exercices qu'on me demandait de faire. Je travaillais sans cesse ma voix et ma tenue, je répétais mes répliques et fredonnais mes chansons à longueur de temps. Je devenais tellement épuisante que mes parents étaient exaspérés par mon agitation constante. Et puis, ils trouvèrent une technique pour que je me fasse un peu plus discrète. Lorsque je commençais à faire des exercices de voix à table, ils me menaçaient de ne pas m'inscrire l'année suivante à mes cours et à me foutre dans un club de sport pour que je me défoule autrement. Je me mis donc à travailler uniquement dans ma chambre ou dans mon jardin, pour ne plus les embêter. Pendant mes cours, je donnais le meilleur de moi-même, puis vinrent les distributions de rôles. Je n'étais pas soliste dans ma chorale. Je n'avais qu'un rôle secondaire en théâtre. L'année suivante, je pris des cours de tennis. À 17 ans, je me teignais les cheveux en vert. Je portais des fringues à la mode que j'associais de façon désordonnée pour me faire remarquer. Pour que les gens me reconnaissent, sachent qui j'étais lorsque je passais dans un couloir et que je secouais de façon non-négligeable ma crinière colorée. Je me trouvais vraiment splendide, mes ami(e)s aussi. Certains m'admiraient parce que j'étais je-m'en-foutiste et que je le valais bien et le reste m'aimait car j'étais anti-conformiste, juste comme eux. J'approuvais leurs idées révolutionnaires, je fumais avec eux juste avant notre cours de français. J'avais réussi à intégrer le groupe de personnes qui m'avait sauté à l'oeil dès mon entrée au lycée. J'étais fière de moi et de mon changement radical, j'étais prête à dire oui à tout ce qu'ils voulaient. Mais je n'étais pas encore assez cool. Pas assez populaire, encore trop invisible. Je faisais mon possible pour être vue de tous, mais rien ne marchait. Il fallait que j'y aille encore plus fort, que je fasse quelque chose de dingue, d'encore plus incroyable. Bien vite, ma lèvre inférieure fut percée. Mes parents ne refusèrent pas de m'acheter des fringues baroques que je savais originales. Et comme les gens ne parlaient pas encore assez de moi, j'acceptai de sortir avec une fille qui était tombée en pâmoison devant moi. J'y étais, les gens allaient enfin prendre conscience de ma grandeur. Ma copine et moi nous fîmes tabasser devant les grilles de l'établissement. Elle se fit poignarder et une opération fut nécessaire. Je la quittais quelques jours plus tard et déménageais pour ne plus être victime de harcèlement. Aujourd'hui, j'ai 27 ans. On dit qu'il n'existe pas de sous-métiers, mais être encore caissière à mon âge commence à devenir lourd. Mes cheveux ont repris une teinte brune et je suis fiancée à un homme. Il est garagiste, je l'ai connu suite à des problèmes de pneu. Il ne s'est pas moqué de moi quand je lui ai dit que je passais régulièrement des castings et que c'était pour ça que je conservais mon métier de caissière. De temps en temps, il passe me chercher au travail. C'était lui qui avait demandé à ce qu'on se voit. Il m'emmène dans un restaurant pas trop cher tous les mois et est plein de petites attentions "mignonnes". Il n'est pas vraiment beau. Mais il m'aime et croit en moi. Mes parents l'apprécient et mes amies me disent que j'ai de la chance. Elles ont raison... Je suppose. On prévoit d'avoir un enfant d'ici un an ou deux. Si c'est un garçon, il s'appellera Lucas, si c'est une fille, ce sera Chloé. Souvent, après avoir entretenu nos libidos respectives, il s'endort et se met à ronfler. Pendant ce temps, je réfléchis et repasse certains moment de ma vie. Je les analyse scrupuleusement et j'essaye de me convaincre que pour le moment, je m'en tire bien... Enfin je crois. Je hais les enfants stars, qui ont une notoriété croissante grâce à leurs parents. Les miens étaient juste bons à hocher la tête et à applaudir lorsque j'étais déguisée en pieuvre, à côté de la princesse des océans. Je jalouse les minettes qui parviennent à être célèbres dès l'adolescence. Pendant la mienne, je n'avais même pas été retenue dans une audition pour entrer dans un groupe de rock amateur. Je maudis les femmes mariées à des hommes célèbres et tout le luxe qui s'en suit. Ce n'est pas Antoine qui sera capable de m'offrir une magnifique voiture et un week end dans un hôtel réputé avec son salaire miteux. Je me démène comme je peux. Le week end, je traque les castings sur internet et passe du temps dans la salle du sport du coin, encouragée par mon coach. Parfois, on flirte tous les deux et il me dit que mon fiancé ne me mérite pas. Lorsque je me regarde dans la glace, il m'arrive de penser la même chose. C'est pour ça que je ne comprends pas. Pourquoi je n'arrive jamais à effleurer la concrétisation de mes rêves? Je n'en demande pourtant pas énormément. Je voudrais juste être quelqu'un. Sortir du lot. Être vue d'une manière différente. Mener une vie palpitante, sans que la routine ne m'emporte. Le téléphone sonne. J'ai une tomate dans une main et un couteau dans l'autre. Depuis combien de temps est ce que je suis entrée en léthargie? Aujourd'hui, nous sommes demain, mais j'ai l'impression d'en être restée à hier. Je fonce jusqu'au fixe et pose le fruit sur le buffet. -Je souhaiterais parler à Marion Lefèvre. -C'est moi. Un prénom et un nom banals, pas du tout vendeurs, tous deux représentant de façon métaphorique une existence ordinaire et pas du tout enviée. -Vous êtes retenue pour l'un des rôles principaux de la série pour laquelle vous avez auditionné mardi après-midi. -... Je ne réagis pas. C'est impossible. J'ai mal entendu. C'est fantastique. Je vais quitter Antoine sur le champ. Je lui demande de répéter. C'est grâce à mes années de persistance. Je vais embrasser mon fiancé dès que je raccroche. C'est merveilleux. Il faut que je me trouve une nom de scène. Je renonce à avoir un enfant. Je vais commencer mon ascension dans l'échelle sociale. J'aurais un amant. C'est le premier instant de ma vraie vie. Je le savais. Après m'être remise du choc, je raccroche sereinement et puis je ferme les yeux. Laisser exposer sa joie maintenant ne serait pas une mauvaise idée... Mais Antoine ne rentrera que dans une demie-heure. Il faut que j'appelle mes parents. Une bouteille de vin est dans le frigo il me semble. Mes amies vont mourir de jalousie. Je vais mettre de la musique à fond, danser et me saouler. Je me sens épanouie. -Je savais que j'étais destinée à être quelqu'un. C'est ma détermination et mon talent que je dois remercier. Pas mes parents, pas Antoine, pas les voisines. Un sourire s'étend sur mes lèvres. Je suis si heureuse, heureuse! Je bats vivement l'air avec mes bras en les plaçant au dessus de ma tête, puis me mets à courir jusque dans la cuisine, pour profiter de ma victoire contre la vie. Mon agitation de tout à l'heure a dû faire tomber un torchon quand je me suis précipitée jusqu'au téléphone. Je sens mon pied glisser, mon corps suivre le mouvement et commencer à partir en avant. Par réflexe, je serre les poings et mets mes mains devant moi pour me rattraper. La lumière des lampes se reflète sur la lame du couteau fermement calé entre mes doigts. Inexorablement attirés, mes yeux s'en rapprochent sans que je ne puisse rien y faire. Tout va trop vite. Toujours trop vite. Pourquoi est ce que j'ai couru déjà?
Miss Steak
Messages : 18 Date d'inscription : 11/06/2013
Sujet: Re: Clafoutis maison Mar 30 Juil - 23:01
Le premier texte j'le connaissais déjà, et tu sais déjà que je l'apprécie ^^ Le second j'avoue il laisse... Pantois. En fait c'est hyper cruel mais trop drôle, la fille on sait pas trop si on doit la plaindre ou rire, j'trouve ça hyper adroit d'ta part, vraiment, fallait chercher. Puis rien que le rythme il est super bien retranscrit je trouve, la vie longue de la fille qui se fait chier, puis tout s'accélère enfin et puis... Chute finale. Franchement j'aime, puis ton style d'écriture j'le trouve cool >u<
Midlecter
Messages : 20 Date d'inscription : 07/04/2013 Age : 26 Localisation : HERE'S JOHNNY!
Sujet: Re: Clafoutis maison Mar 30 Juil - 23:22
Gentille personne c: Bin écoute chuis super contente que t'aies lu étou! Cermi! >u<
Miss Steak
Messages : 18 Date d'inscription : 11/06/2013
Sujet: Re: Clafoutis maison Mar 30 Juil - 23:36
Bah de rien :3 puis le truc chouette aussi c'est que tes pavés bah ils sont pas dégueulasses, t'as pas envie de fuir quand tu vois le bordel parce que perso j'me fais pas chier quand je les lis, vraiment j'en perds pas une ligne ^^
Midlecter
Messages : 20 Date d'inscription : 07/04/2013 Age : 26 Localisation : HERE'S JOHNNY!
Sujet: Re: Clafoutis maison Mer 31 Juil - 9:58
Personne adorable ;n;
Miss Steak
Messages : 18 Date d'inscription : 11/06/2013
Sujet: Re: Clafoutis maison Mer 31 Juil - 10:29
Arrête j'vais rougir x)
Midlecter
Messages : 20 Date d'inscription : 07/04/2013 Age : 26 Localisation : HERE'S JOHNNY!
Sujet: Re: Clafoutis maison Mar 13 Aoû - 22:57
Let's Make a puzzle
Je m'appelle Eldred Maimm. Si j'écris ces quelques lignes, c'est parce que j'ai bientôt fini le puzzle que j'ai commencé il y a 14 ans. Je ne suis pas sur de vouloir le finir, mais il serait ridicule de le laisser en plan alors qu'il ne reste que quelques pièces à remettre à leurs places. Bien que complexe, il ne m'a pas fallu énormément de temps pour le résoudre. Et une fois que ce sera fait, je me sentirais libéré d'un poids énorme.. du moins je l'espère. " Les premières pièces furent placées quand j'avais quatre ans. Mes parents étaient à l'hôpital et j'attendais bien sagement chez ma tante qu'ils viennent me chercher. J'étais à la fois impatient et heureux ce jour-ci. Et puis, un coup de fil retentit dans le salon et on m'annonça que j'avais une petite soeur. Son prénom ne me plaisait pas, mais j'allais m'y faire. Il fallait que je m'y fasse. Penché sur son berceau, je l'observais en respirant difficilement derrière mon masque. J'étais malade et je ne pouvais risquer de contaminer le nouveau-né. Il était minuscule, dodu et chevelu. Bien que je me souvienne de cet évènement et qu'il a marqué ma vie, ce n'était pas ce jour-ci que j'ai commencé mon puzzle, mais deux jours plus tard. Je trouve ça assez étrange d'ailleurs, qu'il fallut que j'assiste à la réaction de ma mère face au décès de sa grand mère, pour que l'envie d'assembler des pièces se fasse sentir en moi. Les premiers contours se traçaient, les premières couleurs se dévoilaient. Quatre années plus tard, j'avais huit ans. Ma mère m'effrayait déjà avec ses menaces et la pression qu'elle m'infligeait me tordait le ventre. Mon père m'envoyait déjà des remarques insupportables à la figure et il m'avait frappé plusieurs fois pour me faire comprendre certaines choses. Mais je les aimais tous les deux, bien que le fait d'être chez moi m'angoissait. Lorsque j'allais chez mon oncle et que ma mère écoutait ses musiques horribles, je sentais un monstre d'obscurité se glisser dans mon dos. Il effleurait ma colonne vertébrale et plongeait ses yeux terrifiants dans les miens, attendant patiemment que je me mette à paniquer. La seule chose qui me rassurait était de me dire que je quittais la maison pour quelques jours. Que j'allais voir des gens qui ne m'ennuiraient pas et que je serais avec ma cousine. tout irait pour le mieux. De plus, ma mère devait quitter la maison pour quelques jours. Mes grands-parents viendraient veiller sur ma soeur et moi et me laisseraient respirer un peu. Ce dont je ne me doutais pas, c'est que ma mère me manquerait tant. Une semaine à Londres suffit pour que j'oublie son visage lorsqu'elle était en colère. Une semaine loin de moi suffit pour que je ne pense plus qu'aux bons moments que nous passions ensemble. Elle devait revenir un samedi et ce jour-ci j'avais école. Elle vint me chercher le midi et en la voyant près des grilles, je me sentis incroyablement heureux. Elle souriait et me tendait ses bras. J'allais vite me loger dans ces derniers, me délectant de sa douce étreinte. Je voulais qu'elle me dise que je lui avais manqué. Elle le fit. Et puis vint cette phrase, qui aujourd'hui encore me torture le coeur. "Cécile est morte". Si je devais décrire cette femme, je dirais que c'était tout comme une tante pour moi. Lorsque j'étais triste ou seul, elle me mettait sur ses genoux et me disait que tout irait bien, que ça s'arrangerait. Je la connaissais depuis toujours et j'aurais voulu qu'elle soit encore présente dans les années qui vinrent. J'aurais voulu qu'elle reprenne conscience avant de sombrer. J'aurais voulu que son mari ne la trouve pas morte dans sa baignoire en rentrant chez lui. Les pièces étaient de nouveau entre mes doigts, pleines de poussière. Je les avais oublié pendant un certain temps. Elles tremblaient un peu et étaient couvertes de quelques gouttes. Je les mettais n'importe où , je ne savais pas trop quoi faire, j'étais perdu. Je revoyais sans cesse ce visage empli de bonté qui me déchirait le coeur. Il me fallu du temps pour digérer la nouvelle, mais j'y arrivais, tout doucement. Du moins je pensais. Mon entrée au collège se fit plus rapidement que prévu et je n'eus pas trop de mal à m'y adapter. Les trois-quarts des gens que je fréquentais étaient gentils au début. Puis vinrent les remarques, les moqueries, les scéances d'humiliation publique et les pointages du doigt. J'avais du mal à faire comme si de rien n'était, ce qui rendait les choses encore pires. Et alors que je n'y pensais plus, Cécile revint dans mon esprit, sans que je ne m'y prépare.Et mon grand oncle mourut, un jour où je prenais la route des vacances, quittant les gens qui me faisaient du mal. Mon puzzle était détruit, il n'avait ni queue ni tête. Les pièces étaient plus sombres qu'avant et je tentais de raviver leurs couleurs en essuyant mes poignés tâchés dessus. Je réussis à remettre les contours en place, mais il était vide. J'attendais, rongé par les souvenirs et un mal-être grandissant qu'il se remplisse seul. Mais rien ne venait. Alors je ne faisais plus rien, je le fixais juste, en priant pour que les pièces se mouvent et trouvent l'endroit qui leur convenait. Je tentais de faire comprendre à mes parents que j'avais besoin d'aide pour ça, mais mes signaux ne furent pas bien interprétés, pas vus. J'avais l'impression que la vie entière me tournait le dos et que mon seul réconfort était la douleur que j'éprouvais lorsque le métal froid dansait avec ma chair. Mon coeur se serrait, mes manches se prolongeaient le long de mes doigts et je n'arrivais plus à tenir correctement l'un des nombreux bouts de carton. Et puis un jour, un ami me vint en aide. Grâce à lui, mes parents prirent connaissance de l'impasse dans laquelle je me trouvais et lentement, ils m'aidèrent à revoir les couleurs vives et les formes de mes pièces. Ma mère retroussa mes manches un soir et mon père pleura pour la première fois devant moi. Ils avaient l'air sincère, alors je décidais d'aller de l'avant, pour qu'ils cessent d'être aussi étranges. La dernière année de collège fut plus douce, mais la première de lycée fut riche en questionnement et en rechutes. Je découvrais petit à petit de nouveaux motifs et de nouvelles couleurs et ça me faisait peur. Je comprenais beaucoup trop de choses sur moi et j'étais effrayé à l'idée d'en parler avec mes ami(e)s. Je suis toujours celui qui écoute. Je n'aime pas trop parler de moi. C'est triste à dire, mais il est rare que je fasse vraiment confiance à quelqu'un. Certains s'en vexent, d'autres le prennent plutôt bien. Et puis j'avais toujours cette fichue manie de me protéger des autres en étant horribles avec eux, dès que je sentais une tension ou une incompréhension. Mes parents, ma soeur et certains amis en furent victimes et bien que ça me démolissait le coeur de faire de telles choses, je continuais inlassablement. Toutes ces choses me fatiguaient et lorsque la mort de mon grand père vint, j'étais plus épuisé que triste. Bien que malheureux, j'avais juste envie que tout s'arrête, je m'éloignais le plus possible des autres avant de revenir en m'excusant. Je souriais pour rassurer les gens avant de fondre en larmes devant eux. Je faisais de la balançoire, en quelque sorte. Mais dans mes nuits d'insomnie, je plaçais énormément de pièces, me hâtant de finir mon puzzle. Je savais que je le finirai vite, je faisais tout pour. Bien que perplexe devant certaines pièces, je m'acharnais et continuais, inlassablement. La pression scolaire augmentait, la mésentente avec mes parents aussi. Mon entourage ne me supportait plus parce que je faisais tout pour. L'année dernière, quelqu'un que je suis supposé aimer est encore mort. Ce qui est triste, c'est que je n'arrive plus à m'en rappeler. Ma mère? Ma copine? Mon chien? Mon meilleur ami? Je ne me souviens même plus de leurs noms. Mon puzzle m'obsède, je suis à deux doigts de voir le résultat final. Je suis à deux doigts de comprendre pourquoi je suis ici, ce qui me maintient en vie. Pourquoi le bordel dans ma tête est-il aussi immense? Pourquoi est ce que je n'arrive plus à dormir? Pourquoi faire souffrir mes proches me rend aussi fier de moi? Pourquoi est ce que je pleure en me posant toutes ces questions? L'encre se dilue un peu sur mon cahier. C'est dommage, j'arrivais à écrire correctement jusque là. Il faut que je me reprenne, à côté de moi, je vois les deux pièces restantes. D'une pensée fébrile, je les pose doucement contre la surface de mon esprit. Ça y est. Je l'ai fini. Certaines personnes ont besoin de toute une vie pour finir leur puzzle. Je ne sais pas si c'est mon impatience ou ce vide qui comble mon coeur qui m'a poussé à me concentrer uniquement là-dessus. Depuis que j'ai quinze ans, je sais que je compléterais tout en trop peu de temps. Mais je me suis fait à l'idée et maintenant, quand je vois le résultat, je me sens apaisé, comme je ne l'ai jamais été. Mon puzzle n'a pas de couleurs. Je les ai simplement imaginées. Mon puzzle n'a pas de forme, il s'étend devant moi en long et en large, sans que je ne puisse le délimiter. Mon puzzle est un tout. Mon puzzle n'est plus rien. Et pourtant il me happe, il efface la tristesse que je n'ai su virer de mon coeur. Mon puzzle retentit dans le fin fond de ma cervelle, et je lâche ce qui semble être la véritable dernière pièce. Mon puzzle est achevé, maintenant, je peux fermer les yeux et être sur que le lendemain, l'angoisse ne me rongera pas le ventre.
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Sujet: Re: Clafoutis maison
Clafoutis maison
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